Il naquit le 4 mai 1823 à Colmar en Alsace. Son père, Antoine Pascal Bernier, était receveur général des finances du département. Sa mère, Marie Nanine, était la fille de Denis Lefevre, secrétaire général des finances sous la Révolution, le Consulat, l’Empire et le règne de Louis XVIII.
Il passa auprès de son père, receveur général des Finances, les neuf premières années de son existence puis quitta l’Alsace pour entrer en pension à Lenzbourg, près d’Aarau, en Suisse.
Le premier tableau de Camille Bernier, Moulin près de Vichy, exposé au Salon de peinture et de sculpture en 1848, attira l’attention (Pour les artistes, l’admission au « Salon » les consacrait comme professionnels et était le passage obligé pour lancer une carrière, il constituait pour eux une des rares opportunités de montrer leur travail, de rencontrer amateurs et critiques et de bénéficier de commandes de l’état).
Mais Camille Bernier ne rappelle en rien son premier maître Léon Fleury (1804-1858). La nature seule lui a servi de guide et la connaissance profonde qu’il en avait en fit bientôt l’un des meilleurs paysagistes français. L’école moderne devait nécessairement influer sur son talent, toutefois il conserva son individualité sans chercher à imiter les grands maîtres paysagistes de l’époque.
Camille Bernier s’expose au public à partir de la première Exposition universelle de 1855 qui se tient à Paris (où il présente son tableau Village d’Arberg) puis par la suite au « Salon des artistes français » jusqu’en 1892.
Ses tableaux rencontrent un grand succès à Paris, et rejoignent les collections publiques.
En mai 1856, il épousa Lucie Emélie Gautier-Mougin, une jeune femme originaire de Guipavas, et ils s’installèrent dans la région de Brest.
En 1857, ils y reçoivent Camille Corot (1796-1875, peintre néoclassique exceptionnel, précurseur de l’école de Barbizon) à qui Lucie Bernier offre un cahier de dessin. En tête de la première page, Corot note au crayon : « Donné à Brest, le 11 mai 1857, par Mme Camille Bernier»
En 1859, ils s’installent vers la Côte d’Azur pour que leur nouveau-né, malade, profite du climat. Il ne survivra pas et sa mère mourra elle aussi, en 1860, à Hyères.
Après le décès de sa femme, Camille Bernier séjourne la plus grande partie de l’année chez ses amis le peintre Vincent Vidal (1811-1887) – bien connu de la société parisienne de l’époque, son talent de portraitiste lui permit de peindre de nombreuses personnalités de la haute société dont Alexandre Dumas – et son épouse Reine Henriette Guimart, qui ont acheté en 1851 à Bannalec le manoir de Kerlagadic et les fermes qui l’entourent (Ce site, lieu noble répertorié depuis plusieurs siècles, aurait été, à partir de 1536, le lieu de résidence de Jean Le Coz seigneur de Kerlagadic, Garslouet, Coator et Sainte Anne et vers 1724, il aurait servi de rendez-vous de chasse à François-Hyacinthe de Tinténiac, chevalier, marquis de Quimerc’h, mousquetaire du roi Louis XV et capitaine aux Gardes Françaises, né en 1701 à Bannalec et mort en 1737).
Les toiles les plus renommées de Camille Bernier seront, désormais, des paysages bretons. Jusqu’à sa mort, il ne peint plus que les paysages de la région de Bannalec, landes, bois, champs, étangs, bocage, fermes et chemins creux.
Cette toile salon de grand format (2mx3m) est datée de 1870 et est conservée au musée de Nantes. Elle représente un chemin creux ombré d’une large voûte de verdure que le soleil perce difficilement, et où l’on peut apercevoir quelques paysans et leurs animaux.
Camille Bernier a aussi produit de rares pastels. Quant aux reproductions à l’eau-forte qu’il tira de ses propres compositions, elles rappellent celles de Charles Jacque (1813-1894) et Charles-François Daubigny (1817-1878), tous deux peintres et graveurs rattachés à l’école de Barbizon. Ses interprétations se recommandent par la distinction, la force, la sincérité et la poésie.
Vincent Vidal meurt à Paris le 15 juin 1887, mais est inhumé dans le cimetière de Bannalec. À la mort de Reine Vidal, à Paris, en 1891 (elle aussi inhumée dans le cimetière de Bannalec), Camille Bernier héritera de ses biens et continuera de vivre une partie de l’année à Kerlagadic. Il passe l’hiver à Paris, rue Jean-Nicot, où il possède un grand hôtel particulier. Il y finit les toiles qu’il a commencées sur le motif en Bretagne.
En 1895, Camille Bernier se remarie avec Oliva Barbara Hoechle, ancienne gouvernante suisse de sa nièce Édith.
Médaillé aux Salons de 1867, 1868 et 1869, il obtint la Légion d’honneur en 1872, un grand prix à l’Exposition universelle de 1889, fut promu officier de la Légion d’honneur en 1892. Il n’en demeura pas moins mécontent de ses œuvres. On le retrouva encore au Salon de 1900, et il peignit sa dernière toile peu de temps avant de mourir. Il décède à Paris le 12 mai 1902.
Très sociable, Camille Bernier compta parmi ses meilleurs amis, Jean-Baptiste Camille Corot, Léon Bonnat (1833-1922, peintre naturaliste), Puvis de Chavannes (1824-1898, considéré comme un grand maître de la peinture allégorique) et Jacques Guiaud (1810-1876, Peintre de paysage, peintre d’histoire, habile dessinateur, aquarelliste de talent qui, grâce à l’accueil chaleureux de Camille Bernier, put sillonner la Bretagne et se faire le témoin de la dévotion populaire dans le Finistère).
Philanthrope, Camille Bernier consacra sa fortune à soulager la misère et fonda, en 1880, à Coz-Castel à Saint-Méen, aux environs de Lesneven dans le Léon, l’école de filles Sainte Anne (environ cent cinquante enfants), en souvenir de son épouse décédée. Il en confia la direction à des religieuses, les Filles du Saint Esprit.
Les tableaux, études et gravures ont été donnés par sa veuve au département du Finistère et formèrent le « Musée Camille Bernier » au Château de Keriolet à Concarneau.
Il est considéré par les critiques contemporains, non seulement comme le spécialiste de la Bretagne, mais aussi comme un grand successeur de Corot qui l’a particulièrement influencé. Artiste oublié aujourd’hui, les œuvres de Camille Bernier, cataloguées comme étant celles d’un « petit maître du 19e siècle », restent pourtant une mine d’informations pour les chercheurs sur les paysages disparus. Plusieurs de ses œuvres se trouvent au musée de Quimper et au musée d’Orsay à Paris.
Sources biographiques
- Gustave Vapereau, Dictionnaire universel des contemporains, 6e édition, Paris, Hachette, 1893
- Édouard Sitzmann, Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, Sutter, 1909-1910
- Aline Bauer, Janine Carpentier, Répertoire des artistes d’Alsace des dix-neuvième et vingtième siècle. Peintres, sculpteurs, graveurs, dessinateurs. Strasbourg, Oberlin, 1984-1991
- Henri Belbéoch, René Le Bihan, 100 peintres en Bretagne, Quimper, Editions Palantines, 1995